
The Bloc-ROCK
Best-of - George Clinton
Pas de syndrome de la page blanche lorsqu'il s'agit de parler de lui. A la limite une page rose, violette, orange, jaune, verte, bleue, rone, viorange, jause, roujaulette, bleulette, voire verje ( mouhaha ). Mais certainement pas blanche.
C'est une révolution catatonique dans l'esprit malade d'un dépressif. Ecouter George Clinton fait à peu près cet effet là.
"Tu te sens mal? Tu te demandes quelle est ta place dans ce monde? Trop bizarre pour vivre mais trop rare pour mourir? Abandonne vite cette merde de prozac. Recrache vite la venlafaxine, mec!" Bon dieu, je croyais que tu ne te droguais pas. Ces médecins n'y connaissent rien. Une décennie d'études pour déceler la vérité inacceptable socialement, qui est d'avoir un coup de mou. Foutue vie, t'as le droit de pas être au top. Mais au lieu d'abrutir ton cerveau de cochonneries, prends une dose de funk. La pilule passe bien mieux, elle a meilleur goût. Le goût de la vie, pas celui de la maladie.
Tu te sentiras tout à fait normal après. Oups, j'ai utilisé un mot interdit. Normal? Normal? Où est la normalité? Disons que pour certains le dépressif n'est pas normal. Foutaises. "Normal" est un mot que je déteste par dessus tout. Qui décide de la normalité? Ceux qui décident aussi de comment tu vas t'habiller, ou de ce que tu vas manger.
Mais on s'égare là. La dernière fois que je me suis autant égaré, je parlais avec une fille. Jolie brune, intelligente, tout à fait charmante, sexy. Je sentais sa chaleur émaner vers moi. Son doux sourire découvrait des dents d'un éclat abrutissant. Assis on discutait. Je tentais rapprochements sur rapprochements, cachés par d'habiles subterfuges. Ses poignets délicats restaient de marbre, mais ses yeux pétillaient. C'était excitant, comme une première fois. J'étais maladroit. Va savoir si ma tentavive de charme faisait son bonhomme de chemin, je crois bien que je reste quand même l'homme qui décèle le moins les signes envoyés par une demoiselle fin prête. Cela à beau être des signaux, des pancartes, des panneaux, je souris comme un con.
Tiens quelle bonne idée! Je vais lui parler d'une autre nana. Gâchons tout jusqu'au bout, parlons d'elle encore un peu plus. C'est là que je me suis égaré. Peut être que ça ne l'a pas refroidi. Il paraît que si une fille t'ignore, c'est que c'est bien parti. Ouf, elle ne répond plus à mes messages, j'ai toute mes chances.
Il serait plus facile de vivre, si on avait le charisme mélangé au talent de George Clinton. Regardez, lui il a pratiquement une équipe de rugby, rien qu'en gosse.
D'habitude je déteste les best-of. Là aussi je trouve que les barrières sont grandes. Derrière les best-of, il y a aussi des pépites. Mais tatata pas grave. Prenons un best-of de George Clinton.
Je me demande comment George fait pour être encore en vie. Jus d'oranges aux acides le matin, steack sauce cocaïne avec ses herbes de provence ( mon oeil ) le midi et seulement buvards de LSD le soir. Ce régime est pour les costauds.
Est-il essentiel de présenter George Clinton? Né en 1941 on sait dorénavant que c'est un vieux monsieur. Et il n'est pas parent de Bill. Voilà, tout de suite le personnage prend vie dans notre esprit.
La carrière de ce vieux monsieur débute fin des années 50, début 60. La grande période. Par côté, il est coiffeur et est son propre patron. Cela se voit sa coiffure. La chanson "she's a rainbow" des Rolling Stones prend tout son sens. Au moment où la belle se coiffe. Sauf que George est un homme. Ah mais qu'importe c'est un détail.
Au début il galère. Son groupe Parliament n'a pas de succès. En même temps ce n'est qu'un groupe de doo-wap de plus. Y a pas d'attentes particulières, on sait ce qu'ils font. Rien d'étonnant. Il fonde alors un autre groupe, Funkadelic, en plus de Parliament. Talent oblige, il ne baisse pas les bras. La musique a besoin de lui. Le funk a besoin de lui. Avec James Brown et Sly Stone, Clinton est considéré comme l'un des pères fondateurs du funk.
Le funk est excessif, arrogant, poussant à son paroxysme les limites du raisonnable. Mais Clinton n'est pas raisonnable. "Limite", il connait pas. "Excessif", un moindre mot.
Il aime les couleurs ( même s'il ne les voit pas ). Il aime les costumes. Cheveux multicolores, pantalons moulants en cuir rose, orange, braguette ouverte sur un calcif aux couleurs de l'Amérique. Bottes à pointes et à talons. Veste grise brillante venue de l'espace avec épaulettes. Par-dessus d'indien. Chapeau à plumes. Il fais plus fort que Sly.
Le but de Clinton c'est de mettre la patate, d'insufler du bonheur. Il s'amuse bien, c'est l'essentiel. Attention c'est pas un clown. Il est très pro et il est le seul crédible.
"One nation under a groove" est sûrement la représentation la plus fidèle de ce qu'est Clinton. Un joyeux bordel enivrant qui t'invite pour une danse.
P-Funk contrôle la planète funky pendant une grande décennie. Parliament et Funkadelic ne forment plus qu'un groupe, peut être deux ( prrrrrfff), avec des musiciens qui vont et viennent d'un groupe à l'autre. Il y a des grosses têtes d'affiche. Fred Wesley, Bootsy Collins ( grand grand bassiste avant gardiste que je conseille vivement ).
P-Funk est dorénavant the groupe. Abréviation de Parliament et Funkadelic, puis genre musical à part entière, signifiant "pure funk". Mélange très groovy du rock et du funk. Touche psyché. R&B.
"Qu'est ce qu'on fait ce soir sur scène? -Oh je sais pas... hier soir on a déjà fait les feux d'artifices, ce soir on déboule sur scène en vaisseau spatial? -Alleeeeez!" ( discussion entre George et Fred, mais je ne suis pas sûr de la véracité des propos, à prendre au second degré, quoique cette discussion a bien du avoir lieu, vérifiez je vous prie le P-Funk était DE-JAN-TE ).
Au début des années 80, Clinton entreprend une carrière solo. Sur scène, ses vieux potos viennent foutre l'ambiance, histoire de bouger les popotins des demoiselles, forêt de boobs, nibards ambulants, têtons tout durs. Il écrit des sacrés tubes "Atomic Dog", "Computer Games" et tant d'autres. Durant ces folles années, et malgré les pures folies, Clinton rencontre des problèmes d'argent avec des histoires de droits d'auteurs. C'est la merde.
Sa popularité s'essouffle. C'est triste. Prince relance un peu sa carrière. Funkadelic signe deux autres albums. Rien de bien mirobolant. Clinton connait un léger renouveau grâce à la scène rap avec Snoop Dog qui s'inspire du style Clinton pour enregistrer "Doggystyle". Il regagne de l'argent. Mais il reste ruiné. Encore aujourd'hui Clinton n'est pas au top. En 2012, il fait appel à la générosité des gens, quémandant de l'argent contre un cadeau ( un autographe, une vieille perruque, un costume ). Sale temps.
Celui qui s'en sort le mieux c'est James Brown. Oui je sais il est mort et je vous vois monter au créneau. Certes il est mort mais au moins il est libre. Sly Stone, lui, vit dans une caravane pourrie au bord de la route, totalement ruiné. Il se fait nourrir par ses gentils voisins ( selon le New York Post ). Le funk a perdu de son prestige. Plus de respect. Les deux survivants sont à la rue, tristes remerciements.
L'album est donc un condensé des plus belles chansons de Clinton solo. En treize titres on passe de "Last Dance" à "Bullet Proof" en passant par "Double Oh-Oh". Ce qui nous reste de l'héritage de Clinton c'est ça. Même si l'image du vieux gâteux n'est pas loin... Merde à la fin, c'est un dieu vivant duquel on retiendra des bons trips et des danses torrides, ultra chaudes, collés-serrés.
Je tiens ce CD d'un héritage. Une ( plus ) vieille personne m'a tendu ce disque. En pleine adolescence je recherchais la nouveauté mais ne voyais rien de marrant. Alors je me suis tourné vers les vieux. Je remercie cette personne de m'avoir légué ce CD à un moment donné, pour faire perdurer l'image du grand barbu coloré déglingos.