top of page

Worried - Asie Payton

  Petit problème un peu baloo, mon lecteur CD ne fonctionne plus. Comment faire pour écouter cette magnifique bibliothèque auditive qui me regarde de ses yeux doux et qui me supplie " écoute moi, je t'en prie, joue ce CD " ? Ben je peux pas.

  En effet, je fais partie de ces gens qui achètent encore leurs CD, et beaucoup en plus. Un CDophile. J'ai trouvé la solution au problème. On va écouter un vinyle. Oui vinyophile aussi.

  En plus, qu'on se le dise, un vinyle c'est tellement mieux. Les CD c'est génial, c'est cool, c'est funky mais les vinyles ça reste quand même autre chose.

  Cette crêpe noire est bien plus qu'un simple objet. Je trouve que les vinyles renferment l'âme de la musique et l'âme du chanteur aussi. Ecouter un vinyle procure un sentiment étrange. Et putain c'est beau.

  Ce qui est beau c'est de ramener le 33-tours chez soi. On ouvre délicatement la pochette et on attrape la galette. Quelle odeur! On respire le vinyle et quelle odeur. On tient quelque chose. N'est-il pas plus agréable de tenir un objet que d'écouter la musique numérique?

  Enfin on glisse le vinyle. On enclenche le bras et on le dépose doucement sur le vinyle tournant. Légers grésillements, tout en douceur. Et le morceau débute. On prend une énorme claque. Aucun son ne peut remplacer celui d'un vinyle. On le regarde tourner, comme hypnotisé. Absorbé par les mouvements et le son. De la pure musique.

 

  En plus des vinyles comme celui que j'écoute là, il n'y en a pas des milliers. Un album de retour aux sources avec en prime un artiste, un vrai. " Worried " se décompose en dix morceaux. Cinq face A, cinq face B. Simple.

  Signé Asie Payton.

 

  Asie Payton est un vrai bluesman comme il est rare d'en trouver encore aujourd'hui. Ce n'est pas que le moule n'existe plus, c'est que le moule n'a jamais existé, artiste hors normes, hors temps, un marginal. Né en 1937, il passe les soixante ans de sa vie dans le Holly Ridge, Mississippi, reclus, dans une cabane sans téléphone ni électricité. Tellement reclus que lorsqu'il pleuvait dans cette région, il était impossible de rejoindre la cabane dans laquelle vivait Asie. Il était agriculteur, et tous les samedis, il endossait un autre costume, celui du bluesman avec une guitare électrique et sa voix, tout simplement. Et ça suffit amplement, tant la force et la volonté de cet homme était énorme.

  C'est en 1995 que le label Fat Possum prend contact avec lui. Il tente de lui faire comprendre que le monde entier doit entendre sa musique. Pas seulement les deux cafés dans lesquels il joue le samedi soir. Non, tout le monde. ( pour situer Fat Possum fait dans le blues et le R&B, et on peut y retrouver des noms comme T-Bone Walker, Junior Kimbrough ou encore The Black Keys )

  Asie refuse d'abord mais il accepte ensuite en 1996, les problèmes d'argent étant trop présents. Asie vivait en effet sous le seuil de pauvreté, dans la misère. Et l'idée de ramasser quelques royalties grâce à sa musique lui a paru finalement bonne. Mais Asie accepte à une condition. Il ne peut pas quitter son travail plus que quelques heures seulement pour aller enregistrer. Humble le monsieur. Il garde les pieds sur terre.

  L'enregistrement se fait en deux fois, d'abord au Junior Kimbrough's club puis au Jimmy's auto care. Les enregistrements sont bien sûr des démos, il faudra les retravailler. Pas le temps. Asie meurt d'une crise cardiaque en 1997 en travaillant sur son tracteur.

 

  La pochette est noire. Juste une photo d'Asie et son nom. Sobre comme le monsieur.

 

  L'album débute et se termine par " I love you ", le morceau le plus connu d'Asie. La première version est électrique avec plusieurs guitares et une batterie. Le morceau débute lentement. Asie chante bien. Puis un orgue apparaît et le morceau prend une autre tournure, virage sec R&B. Il donne le ton, l'album sera blues, rock, R&B, on ne peut pas faire mieux.

  Le second mrceau reflète exactement la vie d'Asie. " Worried Life ". Sur du blues évidemment. En effet les thèmes abordés par Asie découlent du blues. L'amour, le désepoir, la perte, une vie d'inquiétude. Il continue de creuser le sillon pour les générations futures. " All i need is you ", " Please tell me you love me "...

  La face A se termine sur " Asie's jam ". Comment expliquer. Amplis à fond, joyeux bordel. A écouter en priorité et au plus vite. Mais grave.

  Dernier morceau de l'album, " I love you (solo) ". C'est le même que le premier mais Asie joue seul cette fois, juste avec sa guitare. Et là on comprend ce qui a donné envie au Fat Possum records de dévoiler Asie à la face du monde.

 

  Sous l'oeil bienveillant de notre ami, j'écris les dernières lignes. La musique d'Asie est très créative, pure. Et on voit que le sillon qu'il a creusé a aidé beaucoup de nos artistes aujourd'hui ( on ressent l'influence d'Asie dans la musique de Beck par exemple ). Un mec simple et sympa qui a attendu de pouvoir dire à tous son message, pour mourir en paix finalement.

  Fin du vinyle. Le saphir gratte les dernières stries, arrive au milieu, grésillements, pof le vinyle ne tourne plus.

  • Wix Facebook page
  • Wix Twitter page

Max vous remercie. Parce qu'on est bien comme à la maison. Proudly created with Wix.com

bottom of page